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Ethan, volontaire de l’ordinaire, parce que conforme à ce que on est en droit d’attendre d’un homme occupé à faire son devoir au quotidien, ne se voulait ni expert, ni idéologue et fuyait avec la dernière énergie tant la performance, l’autorité, que le pouvoir. Il était donc devenu avec bonheur un homme de « petit goût ». Les traces de l’aventurier et du militant, à force d’abandons, de compromis, de passions et de croyances, s’effaçaient chaque jour un peu plus sous celles de l’effort persistant et continu du nomade qui, se confrontant aux circonstances, faisait toujours le choix des options les plus contraignantes et les plus difficiles, sinon quel intérêt ? Contrairement aux deux autres, il ne provoquait jamais l’évènement, mais tentait de le gérer au quotidien et à l’ordinaire avec une responsabilité assumée mais rendue modeste par les épreuves. Il reprenait : Guéri des toxines passionnelles et du pouvoir je reste prometteur, sans avoir jamais rien promis. Lucide, je vois bien qu’ils sont tous assoiffés de certitudes, d’apparences exemplaires et de fictions sociales convenues; alors que mon libre-partir s’exerce sur des chemins de traverse, il permet la rencontre, cette mise en tension, ce choc salutaire dont je prendrai bien soin qu’il ne se transforme jamais en une relation confortable qui me mènerait tout droit à une momification.   

Oui, Ethan, animal politique émergent moderniste, par son errance volontaire décalée et désenclavée semblait bien occupé à réinventer le lien ancien des marchands ambulants et des troubadours d’antan qui, allant de foires en marchés et de ville close à l’autre et l’air de rien moquaient et empêchaient l’immobilisme seigneurial de sombrer dans la vision psychotique d’un espace à la fois confiné et autoritaire. Donnant la priorité au situationnel il est cette figure politique saisonnière, advenue, évènementielle qui considère que tout moment est le bon et tout mouvement de saison, pour enfin reprendre les habits du métèque délaissant par-là l’uniforme qu’il n’avait fait qu’endosser provisoirement.

Hugo Pratt

 

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