Personne n'avait jamais vu jusqu'à présent, dans le campement, quelqu'un se déplacer aussi lentement. Son pas tranquille, tel un compas, semblait arpenter avec circonspection la surface des terres qu'il foulait. Était-ce une pose, celle de l'éternel nomade errant qu'il prétendait être ? On était vite tenté de l'interroger sur cette pratique surprenante. A peine fait, la réponse fusait, comme un slogan: " depuis Napoléon et jusqu'aux derniers Blitzkriegs, je considère la vitesse comme une manière de violence, une sorte d'extrémité physique, reflet inconscient d'une moralité douteuse.
C'est tout, même si ça n'explique rien; et puis aussi, ralentir mon pas permet dorénavant que chaque chose vue rappelle à ma mémoire certains souvenirs et ça me convient; toute la pensée d'un homme n'est-elle pas dans sa nostalgie ? " Alors, plus encore que ses traits, c'était sa silhouette en mouvement qui se reconnaissait entre toutes, de jour comme de nuit, inimitable...